Thierry Renou à la table des Etoiles aux Epicuriales

Aux Epicuriales, Thierry Renou signe un diner bien balancé entre cuisine française et parfums de vacances. Caviar, foie gras et sole du bassin, les stars d’une jolie carte étoilée figurent au menu. Bouillon Thaï, citronnelle et combawa, les saveurs d’Asie viennent sublimer sa cuisine d’une touche très personnelle. Pour autant, le chef du Patio à Arcachon ne joue pas l’effet de mode. L’Asie le passionne depuis longtemps, la Thaïlande est devenu son pays de cœur, une deuxième patrie._DSC7383

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 Sous la tente des Etoiles, seule une baie vitrée sépare la cuisine de la salle. Les convives sont comme au théâtre, ils peuvent suivre les évolutions de la brigade. Elle travaille sous leurs yeux. Thierry Renou a complètement séduit son public en jouant la carte des émotions partagées. Il a commencé en douceur avec des notes presque classiques. Dans un second temps, il a libéré son jeu, Il  a donné de la puissance pour le plat principal. Son bouillon Thaï embaume le lait de coco et la feuille de Kaffir, les souvenirs de nos vacances en Asie reviennent en flash. Au final, il nous a ramené en enfance, au temps des cigarettes russes, la gourmandise préférée de mémé._DSC7396

Superbe soirée donc sous le chapiteau de la table des étoiles, rendue possible par le professionnalisme de l’équipe cuisine drivé par Hervé Dindin. Le chef exécutif du groupe Arom a travaillé en parfaite harmonie avec Thierry Renou. Ensemble ils ont adapté et ajusté les recettes crées pour huit convives, à l’échelle des 100 couverts servis aux Epicuriales.

Thierry Renou arrive vers 19h, il prend possession d’une cuisine où s’affairent déjà les cuisiniers de chez Lacoste Traiteur. Le chef commence par tester le bouillon Thaï qui mijote gentiment. Il goûte, rectifie, prend l’avis des deux membres de sa brigade venus en soutien. Il ajoute une poignée de coriandre hachée pour corser les parfums, une pointe de sel et stoppe la cuisson, satisfait.

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Ensuite il dresse l’assiette témoin de l’entrée, le modèle à l’intention de l’équipe. Il prend le temps de réfléchir, d’ajuster sa présentation, recommence puis décide de la juste place de chaque ingrédient. La brigade observe, écoute, recueillie. Elle claque des « oui chef » sonore lorsque Hervé Dindin distribue les taches. Cette opération sera bien sur répétée pour chaque plat.

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Le diner démarre tranquillement par un tartare d’esturgeon et caviar on the top servi au fur et à mesure que les convives rejoignent leur table. Vers 20h30, le vrai top départ est donné. Le rythme est soutenu. Les assiettes doivent sortir rapidement, le service suit la cadence, le client ne doit pas attendre. Malgré la tension, l’ambiance reste sereine. Chacun assume son rôle avec calme. On enchaine rapidement sur le poisson, le fromage et le dessert. Celui-ci fait monter la pression en cuisine.

Thierry Renou a choisi de servir son tartare de fraise en rouleau. L’humidité du fruit va fragiliser la pâte à cigarette. Ne pas la briser représente un vrai challenge pour le pâtissier. Conscient de la difficulté technique, le chef encourage son équipe et demande de fournir l’effort ultime. Il les accompagne de la voix jusqu’au clap de fin. En salle, les convives ne perçoivent pas le stress. Dans l’univers de la haute cuisine, Le chef partage son idée de l’esthétique et des goûts. La technique est un moyen qu’il cache avec élégance._DSC7866

Pour  aller plus loin, pour les fans de food, voici le descriptif des plats servis. Chaque service représente 100 assiettes à sortir à bonne température en un minimum de temps. Chacun mesure le défi.

On commence presque classiquement avec un foie gras poêlée accompagné d’un biscuit de pomme de terre surmontée d’une mousseline de pomme de terre à la truffe et sa pelote de foie gras-pomme de terre. Une seule touche exotique pour ce début, la graine de Sobacha qui apporte un côté croquant au foie gras poêlé.

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On continue par une Sole du bassin, bouillon thaï, huîtres et raviole éphémère.

L’assiette se compose de gambas crues grossièrement hachées, de pois gourmands, d’huîtres pochées dans leur eau, d’une sole levée en filets et juste raidie au sautoir, de shiitakes cuits à l’huile d’olive avec une pointe d’huile de sésame en fin de cuisson et d’une raviole éphémère à la betterave rouge et au chou chinois. Pour la touche de couleur, le chef ajoute de la carotte jaune en ruban et de l’algue Nori en cheveux d’ange. En salle on ajoute le bouillon coco parfumé à la citronnelle, à la coriandre, au galanga et à la feuille de Kafir. Le liquide brulant vient saisir les gambas, il dissout la feuille d’oblat qui enveloppait la raviole libérant son contenu coloré. Il dégage des parfums puissants qui réveillent en nous des souvenirs de vacances. Il suffit de fermer les yeux pour retourner à Chiang Mai. C’est un délice, le cuisson du poisson est parfaite, le bouillon est tellement bon, tellement parfumé qu’on lècherait bien l’assiette.

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Thierry Renou termine par Final punchy, coloré et régressif. Un cigare à la gariguette, combawa et fraise Tagada. Le chef a imaginé un tube en pate à cigarette extra fine. Il le remplit d’un tartare de fraise parfumé au combawa, termine par une mousse fraise et la décore d’un rail de fraise Tagada râpée. Il couche sa cigarette sur une feuille de chocolat blanc parfumée à l’estragon et l’accompagne d’une glace citronnelle posée sur une fraise Tagada._DSC7968 _DSC8047

Visuellement, c’est très graphique, colorée et presque ludique. On aimerait bien jouer avec le tube comme on faisait avec les cigarettes qui accompagnaient la glace dans les repas de famille. Le rouleau est trop fragile et puis on est à la table des étoiles, pas chez mémé. En bouche, de la fraicheur, des parfums et un bel équilibre entre le sucré et l’acidulé, on a adoré.

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Jolie soirée donc : une pointe d’audace, de la puissance, des parfums de vacances et un souvenir d’enfance.

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Cédric Béchade aux Epicuriales : la muscade de mémé booste la cuisine moléculaire.

J’aime la France. Pas très hype? Déso, jamais su mentir. Bordeaux est the place to be après Paris of course. Je préfère le charme et l’authenticité du Cap Ferret aux plages Balinaises et la cuisine française à toute autre. Voilà c’est dit.

Oui la cuisine française est la plus belle du monde surtout quand elle est pratiquée de façon très contemporaine : tout près du produit, passerelle entre la tradition et la modernité.

Aux Epicuriales, Le Chef de l’Hostellerie de Plaisance à Saint-Emilion nous a régalé d’un plat élégant d’apparente simplicité : une poularde rôtie & son blanc de poireau laqué.

La Noix de muscade. Mémé l’utilisait pour parfumer sa bonne sauce béchamel. Elle cherchait alors à endormir nos papilles rebelles à la consommation de gratin de chou-fleur ou tout autre légume bouilli. Cédric Béchade a découvert d’autres vertus à cette épice oubliée. La muscade au goût puissant vient booster son espuma d’oignon. Tu garderas longtemps en bouche le parfum puissant de l’aromate, un joli souvenir associé à la poularde rôtie du chef. Un plat aux saveurs quasi-familiale sauf qu’avec la cuisson basse température, la feuille de cerisier frite, le jus de volaille réduit en sirop et l’espuma, on est bien dans l’hyper technicité et la créativité de la haute cuisine.

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On retrouvera le même parti-pris de l’ancien et du moderne dans les autres plats du menu de la soirée. On en parle juste pour le plaisir :

Pour commencer :

Une mouclade revisitée, avec le pineau en gelée, un ajout de pain de poisson en cube et caviar on the top. Ecume parfumée aux écorces de pin.

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La poularde à suivre 

Pour terminer :

une fantaisie framboise et brunoise de poivron rouge, la note très Sud-Ouest. Sur une panna cotta amande, le chef installe un tube opaline garni de framboises et mousse framboise. En contraste de saveur, la framboise en marmelade et en pickles. Biscuit citron en mini dés on top.

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Si la dégustation nous promenait entre mémé et Thierry Marx, la cuisine elle, prenait des airs de studio hollywoodien comme un remake de the Artist ; en vedette Cédric Béchade, un Jean Dujardin qui n’aurait pas abusé de la béchamel de mémé. Une ressemblance dans la silhouette additionnée d’une parfaite maîtrise des codes du noir et blanc : le noir pour la barbe de deux jours, le tablier , la jolie montre et les boutons de manchette argent, le blanc en contraste, le geste économe et la parole rare. La cuisine c’est presque du cinéma quand elle se donne en public et sous caméra comme ce soir-là.

Cédric Béchade

Vendredi soir, escapade en Bretagne Nord aux Etoiles d’Epicure

Soirée d’ouverture des Epicuriales sur Le thème 1855, les grands crus classés.

Vendredi soir, le chef de Carantec, Patrick Jeffroy, deux macarons au Michelin, proposait aux 95 convives une escapade en Bretagne Nord à la table des Etoiles d’Epicure. Menu tout poisson, le bar et le homard en vedette, le caviar Sturia en star locale.

Un assortiment de très beaux flacons en accompagnement. Château Haut-Brion 2011, Château Rauzan-Segla 2008, Château Rauzan-Gassies 2008, Château Léoville-Poyferre 2011…et en Blanc Château D’Yquem 2011, Château la Tour Blanche 2009, Clos Haut-Peyraguey 2010 ; tu me suis ? J’arrête tu vas regretter de n’être pas venu.

Le chef joue en extérieur, il est venu seul, sans sa brigade. Il doit faire équipe avec un traiteur. Lacoste est le partenaire du gastro-événement de l’été sur les allées de Tourny. Son chef exécutif, Hervé Dindin a travaillé en amont sur les idées de Patrick Jeffroy. Le challenge : adapter l’idée originale à l’échelle de la soirée. Pour coller au plus près de la recette, Lacoste traiteur a fait un marché de produits listés très côte Ouest: Bar sauvage de la Cotinière, homard bleu et fraises de Plougastel.

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J’ai eu le privilège de suivre les chefs en cuisine tout au long de cette soirée d’exception. Voici en partage les moments forts de cette soirée. Tu dois juste faire preuve d’imagination pour ressentir l’ambiance, le stress mais aussi la complicité, la confiance. Une cuisine c’est un concentré d’humeur. N’oublie pas que la brigade travaille en direct, sous les yeux des convives. Pour corser l’histoire, un caméraman filme en continu, les images arrivent en direct, sans filtre, sur deux écrans installés dans la salle à manger. Les chefs devront modérer leurs propos ; ni cri, ni bousculade pour ne pas basculer dans Cauchemar en cuisine.

Le diner est prévu pour 20H. On commence gentiment par un apéritif sur la terrasse extérieure. Très vite, l’amuse bouche est lancé : un tartare de Bar, concombre et pomme verte, caviar Sturia on the top. Les assiettes sont dressées à la demande, une fois les tables bien installées. Inimaginable de laisser le caviar monter en température.

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L’entrée, elle, doit être envoyée pour l’ensemble des convives, le Chef Jeffroy y tient. Certains clients s’attardent à l’apéritif, le breton ne se démonte pas. Il va lui-même les chercher en terrasse. En suite on enchaine. La pression monte en cuisine. Le chef Dindin donne le tempo au service : allez, allez on y va là, on accélère.

Duo de homard tiède et de foie gras truffé à l’anguille fumé, asperge verte et purée de panais. Une écume de jus de tête, parure d’anguille colorée au charbon de Bambou en touche finale. Pendant la dégustation, l’équipe repire, se détend. Le chef Patrick Jeffroy reste attentif aux convives. Il guette les réactions sur les visages. Les assiettes reviennent vides, c’est tout bon.

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La brigade se remet en position pour dresser le plat principal : un pavé de bar sauvage au beurre d’herbes : cerfeuil, estragon, coriandre, cresson. En garniture pomme de terre Vitelotte taillées en bonnotte et bonbon de grenaille. Comme au théâtre, les rôles sont distribués à l’avance. Chaque élément de la composition est mis en place par une personne différente. L’équipe travaille en ligne, dresse une longueur d’assiettes. Les gestes sont précis et rapide, L’obsession du garder chaud est dans toutes les têtes. Le chef surveille l’ensemble et verse le beurre d’herbes en touche finale avec un Entonnoir doseur à piston. L’assiette est généreuse, colorée, superbe ! Le service envoie très très vite. On enchaine les 95 assiettes dans un temps record.

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C’est  bon, c’est parti. La pression retombe !

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Viendra ensuite, le fromage, un peu une récréation. Le chef a choisi de partager un souvenir d’enfance, une recette de sa maman : un roquefort comme un nougat glacé. Il s’agit d’un mélange 50/50 de beurre salé et roquefort écrasé. Patrick Jeffroy y ajoute des amandes, pignons de pin et autres fruits secs. Il met la préparation en forme dans un moule à Cake. Il va servir une fine tranche accompagnée d’une salade et d’une tranche de pain de mie cacaoté.

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En dessert, le chef a imaginé une ganache très chocolat. Il y a couché des fraises de plougastel slicées. Quelques grain de sucre cristal on the top pour booster le goût du fruit, le tout surmonté d’une chantilly bergamote. L’assiette est présentée avec sa tuile accordéon glace yaourt citronnelle.

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Magnifique repas de fête, préparé en amont mais terminées sur place dans la cuisine ouverte sur la salle à manger du restaurant éphémère.

Pour cette première soirée, on peut parler d’un sans faute, même si le chef Patrick Jeffroy aurait aimé un peu plus de punch. Toute le long du diner, il maintiendra une ambiance extrêmement concentrée. Les oui chefs fusent à la moindre demande ou remarque. C’est très très pro. On sent parfois une pointe d’agacement du patron quand une préparation n’est pas à la hauteur de sa cuisine. Il aimerait des bonbons de pomme de terre plus dorés, une saveur de bergamote plus prononcée dans la chantilly.

Dans la salle, les convives ne perçoivent rien des bruits étouffés de la cuisine. L’atmosphère raffinée crée par une décoration ultra blanche apaise. Les jolis flacons servis tout au long du diner participent complètement au succès de la soirée. J’ai relevé pas moins de 71 crus différents. Les tables s’animent, le niveau sonore monte. On est bien. Merci Chefs !

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